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lecture
LE DESERT SACRE
par Michel Bonvalet
En ce temps
là, Edith Lesprit se faisait appeler Eric…Pourtant 1968 était
déjà passé par là et la femme enfin libérée…
Sans doute pensait-elle qu’un auteur masculin de Signe de Piste était
plus crédible auprès des jeunes lecteurs qu’une jeune femme
ayant déjà parcouru la plus grande partie du monde.
Depuis, les nouvelles éditions ont repris le prénom d’Edith
et ce n’en est que mieux.
Edith Lesprit a vraiment un très grand talent de conteuse.
Son livre à peine ouvert nous transporte en pleine aventure dans
le bush australien en compagnie des Australoïdes. On est littéralement
transportés dans un monde inconnu qu’elle nous donne envie de découvrir
avec elle.
Une fois encore elle parle de ce qu’elle connaît bien puisqu’elle
a côtoyé et vécu avec la tribu des Gubabingus au
cours d’un séjour d’étude ethnographique sur les Aborigènes
d’Australie.
Son récit est admirablement documenté. Les mœurs, les coutumes,
les dialectes, la nourriture, les armes et les rites initiatiques, tout est
fidèlement décrit et inclus dans ce roman au fur et à
mesure du déroulement de l’histoire.
Afin de justifier ce documentaire qui nous donne une autre vision de ces
êtres frustres qu’on disait il y a encore peu de temps sauvages,
alors qu’ils ne sont que primitifs et désireux de conserver cette liberté
qu’ils cultivent dans une itinérance permanente, l’auteur a
imaginé l’aventure d’un jeune garçon de 15 ans, Christopher
Mac Cullagh.
Au cours d’un voyage en jeep avec Mark, son frère aîné,
dans le désert australien, il se retrouve seul auprès du véhicule
en panne tandis que son frère part chercher du secours à plus
de cent kilomètres.
Le soleil, la soif ont raison de lui et c’est un corps inanimé que
découvre Kindu le jeune fils du chef de la tribu des Gubabingus
Soigné, nourri, adopté par le chef comme son second fils,
Chris va devenir au fil des mois un véritable aborigène sous
le nom de Moko-Moko. Pendant plus d’un an, il va partager la vie de la tribu
nomade, il sera même initié aux rites secrets et recevra les
tatouages rituels faisant de lui un véritable guerrier.
Il prendra conscience du racisme envers ces peuplades pacifiques mais dérangeantes
par leur refus de la civilisation blanche et de leur extermination progressive
jusqu'en 1962 quand ils ont obtenu des droits sur les territoires qu'ils
occupaient depuis plusieurs milliers d'années (on pense également
aux indiens d’Amazone, entre autres).
Bien sûr, Moko-Moko devra retourner vers les siens au prix d’un grand
déchirement, laissant la tribu à sa liberté et à
ses grands espaces.
Edith Lesprit nous dévoile la vie des Australoïdes demeurés
à l’âge de pierre, avec force détails y compris dans ce
qui peut nous paraître cruel comme l’abandon des vieux ou la suppression
d’un nouveau né jumeau pour réguler leur population. Rien ne
nous est épargné des dangers du bush et du désert : serpents,
scorpions, crocodiles mangeurs d’enfants…
C’est dur. C’est passionnant. C’est l’aventure sous sa forme la plus forte…La
vie primitive dans sa plus simple expression.
Il y a du Yug, du Longue piste dans ce roman qui a pris sa
place parmi les classiques de Signe de Piste et qui a reçu le «
Prix de la joie de vivre par le livre en 1976. »
Je ne saurai que trop recommander à ceux qui ne l’ont pas encore
lu de plonger dans cet univers mal connu.
Il vaut cent fois mieux qu’une télé réalité
spécialisée dans l’art de survivre.
Edith
Lesprit a travaillé avec"médecins aux pieds nus" entre autres
missions humanitaires et fondé l'ADAPT (association pour le développement
de l'acupuncture dans les pays du Tiers monde). Elle a écrit de nombreux
ouvrages pour la jeunesse dont ces trois pour Signe de Piste:
Le désert sacré, NSDP 4 (1975)
Le banian écarlate, NSDP 131 (1986)
La piste des larmes, NSDP 139 (1988)
Le Désert sacré
Edith Lesprit
Illustrations de Pierre Joubert
Le Nouveau Signe
de Piste n°4
Editions Alsatia-EPI 1975
©2004 Michel Bonvalet
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