fiche lecture

La Cabane aux chansons

Georges Ferney


Michel Bonvalet


La rééditon d’un roman de Georges Ferney est toujours un évènement marquant. Nous avons déjà avec son héritier Christian Floquet effectué un « Entretien au coin du Net… » retraçant sa biographie et sa bibliographie qui s’avère très complet.

Cet auteur aux facettes multiples a donné à Signe de Piste  quelques uns de ses meilleurs romans. Rappelons pour mémoire : Fort Carillon, La Ménagerie, Le Château perdu, LePrince des sables, Le chemin de la liberté…et d’autres parus chez différents éditeurs sous des pseudonymes variés.

Ce fut le cas de « La Cabane aux chansons » que réédite les Editions du Triomphe sous le nom de l’auteur ( ce roman était paru initialement dans la collection Jamboree n°55 sous le nom de Jean-Yves Corin)

Ce n’est certes pas un roman majeur de l’œuvre de l’auteur mais il a la particularité de nous entrainer dans un monde musical qui nous permet d’appréhender la passion de l’écrivain pour le Bel Canto et le chant chorale.

Une histoire simple, conté avec beaucoup de tendresse sans tomber dans le mélo, des enfants de petite condition unissant leurs forces et leur amitié pour aider l’un des leurs, un vieux soliste retrouvant sa jeunesse à travers le dynamisme de ces jeunes… des bons sentiments bien sur, mais sans que ceux-ci ne rendent mièvre le récit.

Il y a aussi un méchant qui voudrait se venger mais une fois encore ce n’est qu’un épisode de l’histoire qui ne prend pas assez d’ampleur pour gâcher la beauté du geste de ce groupe.

Marco et Bruno sont amis avec Luigi impotent à la suite d’une poliomyélite. Passionnés de chant, ils décident de fonder une chorale de quartier, nous sommes dans le sud de l’Italie où le chant est une seconde nature, afin de trouver l’argent nécessaire à une opération qui pourrait rendre sa mobilité à leur ami.

Celui-ci possède une voix de soliste…ce sont tous des enfants n’ayant pas encore subi la mue catastrophique de l’adolescence.

Ils décident de demander de l’aide à Monsieur Baldini ancien musicien soliste devenu marchand d’instruments de musique….

Beaucoup de chants italiens, de cantiques et de Bel Canto… accompagnent cette belle histoire d’amitié.

Un roman pour jeunes ados qui ne laissera pas les adultes insensibles.

La préface est de Bruno Saint-Hill.

Notons la reprise des illustrations de Michel Gourlier touchantes par leur simplicité et leur qualité.



EN SUPPLEMENT:

L'avis d'Alain Gout sur ce roman :

Il est rare que je propose sur le forum une petite fiche de lecture. Je crois même que c'est la première. Il est vrai que mes fonctions antérieures faisaient que je pouvais difficilement, du moins c'est ma conception personnelle, à la fois éditer des livres et en faire la critique. Surtout quand c'est pour en dire le plus grand bien : ça aurait pu paraître un peu partial, voire suspect.
Si je le fais aujourd'hui, c'est que je suis libéré de cette contrainte et qu'il y a très longtemps que je n'avais pris autant de plaisir à la lecture d'un Signe de Piste. Enfin, Signe de Piste, non par la marque de fabrique mais dans l'esprit, car il s'agit d'un petit cousin Jamboree. La lecture de ce livre, ça a été deux cents pages de petits bonheurs tout simples. C'est un titre qui n'avait pas retenu mon attention avant, mais il faut dire qu'il n'était pas très attirant : un nom d'auteur inconnu : J.Y. Corin ! non inscrit au Panthéon des Grands Auteurs du Signe de Piste et Annexes ; une couverture de Michel Gourlier qui n'est pas sa meilleure ; et un titre plutôt banal : "La Cabane aux chansons", car c'est de ce roman qu'il s'agit. Ce titre, composé de "cabane" et de "chansons'' on ne peut pas dire que ça claque au vent de l'Aventure et que ça peut faire rêver comme "Le Relais de la Chance au Roy", ça ne fleure pas le mystère comme "Le Bracelet de vermeil", ça n'a pas le panache "Sang et or" des guerres de Vendées, surtout dessinées par Joubert...
Et pourtant, quelle surprise ! D'abord en découvrant, sur la couverture de la récente réédition des Editions du Triomphe, le nom de Georges Ferney. L'anonyme J.Y. Corin, si je peux m'exprimer de façon aussi antinomique, cachait... Ferney. On n'est plus en terre inconnue : avec l'auteur de "Fort Carillon" et du "Château perdu", on est dans le Panthéon du Signe de Piste ! Alors je l'ai lu, pour voir de quoi il ressortait, et j'ai découvert un petit bijou, au point que je serais tenté de rectifier la phrase précédente et de parler de l'auteur de "Fort Carillon", du "Château perdu" et... de la "Cabane aux chansons".
L'histoire est assez simple, presque banale. Cette cabane n'est pas nichée au fond des bois ni dans les branches d'un chêne séculaire - laissons cette spécialité à Guy de Larigaudie ou Jean-Louis Foncine -, elle traîne au fond de la cour d'un immeuble d'une ville italienne qui évoque Naples ; et ce qu'on y chante, ce ne sont pas ni des chansonnettes, ni des chansons scoutes. Une bande de raggazzi veut s'y réunir afin de créer une chorale. Ce qui, là aussi, peut sembler assez banal.
Ce qui l'est moins, c'est la peinture que Georges Ferney fait de ces enfants, pauvres comme pouvaient l'être les sciuscia de l'après-guerre, mais riches d'un amour, d'une solidarité et d'un courage sans faille. La délicatesse avec laquelle ils s'occupent de l'un d'entre eux, qui a perdu l'usage de ses jambes et pour qui cette chorale est créée, et comment, avec quelle ingéniosité, ils vont s'efforcer d'y parvenir, sans connaissances musicales, c'est le sujet du roman. Les voilà embarqués dans une entreprise hors de leur portée, autant dire folle et démesurée. Ils vont y être aidés par une rencontre providentielle, celle d'un ancien violoniste virtuose, dont la vie a été brisée par la mort de ses deux fils pendant la guerre (on est "dans les années 50").
L'entrée du petit Marco, à la recherche de travail après s'être fait viré, dans la boutique d'instruments de musique du vieux violoniste, c'est le début d'une belle histoire. Le vieux qui le voit entrer, c'est un peu comme si un grand virtuose se retrouvait nez à nez avec un Mozart enfant ! La rencontre est cocasse : le gamin vient de voir, dans la vitrine de la boutique délabrée, une annonce : "Cherche jeune garçon pour travail facile". Il pousse la porte, tremblant et désespéré car toutes ses tentatives pour trouver un travail ont échoué. Il entend alors le vieux carillon qu'il vient d'actionner, sa musique le saisit, et il reste là, sous le charme, devant l'homme qui est amusé et assez surpris. Quand il aperçoit enfin le vieil homme qui l'observe , il demande : " Vous permettez, Monsieur, que je le fasse jouer encore une fois ?" Il en a oublié ce pourquoi il était entré, au risque de laisser filer sa chance, tandis que le vieux musicien est subjugué par cet enfant visiblement plus sensible à cette belle musique qu'à ce que débitent les radio. Il a devant lui un petit Mozart.
Et c'est la grâce de cet enfant, son ingéniosité et son courage qui vont, peu à peu, permettre à l'homme qui l'a engagé, de retrouver le goût de vivre, et le conduire ensuite, après qu'il ait repris goût à la vie, à prendre en main la chorale, et à permettre à ce Marco et à ses copains de réaliser leur rêve : donner des concerts et rassembler les fonds pour faire soigner leur copain paralysé.
Tout cela, sans le talent de Georges Ferney, aurait pu faire un gentil mélo, un conte au pays des Bisounours. C'est, au contraire, un roman d'une grande fraîcheur car les personnages y sont vrais, poignants et drôles. Le roman baigne dans une atmosphère magique, peut-être celle qui fait la grâce de l'enfance. On pense à "La Cage aux rossignols" ou aux "Choristes"...

A ranger dans la catégorie des pépites cachées du Signe de Piste, avec "Piqualise" ou "La belle jeunesse de Quincambois".
Et à lire toutes affaires cessantes.

Alain Gout


La Cabane aux chansons
Georges Ferney
Collection Totem
Editions du Triomphe 2011
Illustrations de Michel Gourlier



©2011/2012  Michel Bonvalet